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Pune mi amor.
23 mars 2011

Suite du voyage - Varanasi

  Donc, pour reprendre mon histoire, après ma nuit passé seule à l'hôtel à Delhi, j'ai pris un vol le matin pour rejoindre Aurore et l'une de ses copines, Mathilde, à Varanasi. J'étais censée les attendre pendant 3 heures, puisque nos vols n'arrivaient pas à la même heure, mais j'ai fait bien mieux que les attendre ... A peine descendue de l'avion, j'ai senti que je ne pourrais plus faire 3 pas sans tomber dans les pommes ; je n'étais malade que depuis un jour (l'accumulation des réveils à 5/6 heures du mat et le rythme soutenu du voyage a dû beaucoup jouer!) mais en gros, mon estomac avait refusé toute nourriture depuis, et je n'avais plus rien dans le sang ... j'ai donc passé mes 3 heures sur un lit d'hôpital, le temps d'une perfusion de je sais pas trop quoi pour me redonner des forces. Et ça a très bien marché, j'étais de nouveau sur mes pieds ensuite, prête à continuer l'aventure ! Le docteur et son assistant ont été très chous,  quand ils ont vu que je pleurais (mes nerfs ont un peu lâché, je ne voulais PAS être malade, et c'était la première fois qu'on me faisait une perf ...) ils ont été très gentils, un peu comme avec un enfant qui a peur ^^

  Donc, Varanasi, la ville où les Indiens viennent éparpiller les cendres de leurs défunts, là où les rives du Gange sont propices pour mourir puisque cela libère du cycle de réincarnation, mais aussi pollués à des taux inimaginables ...

 

Cette étape m'a marquée d'une manière étrange, je ne saurais pas vraiment dire si en bien ou en mal, plutôt d'une façon … intéressante. Mais dérangeante. TRES dérangeante. Et enrichissante à la fois.

  Déjà, parce que se promener sur les bords du Gange à Varanasi, ou faire un tour en bateau, ça veut dire plonger dans l'intimité des gens : on sent la ferveur autour de soi de ces gens qui se déshabillent (pour les hommes) et se lavent ou nagent dans le Gange, tout en étant très concentrés et persuadés qu'ils se purifient par ces actes. Et les prendre en photo a toujours un côté voyeuriste, dont ils ont l'air de ne pas s'offenser, ce qui est peut-être encore plus choquant pour nous … Et puis il n'y a pas que les bains pris dans le Gange, il y a aussi les crémations qui se succèdent, les proches des défunts qui se font raser la tête pour la cérémonie funèbre, les boutiques spécialisées en « linceuls » de couleurs (différentes pour les femmes, hommes et personnes âgées), les tas de bois partout qui rappellent la mort omniprésente.

   Mais ce qui nous a dérangées par dessus tout, ce n'est pas exactement de se sentir frôler le voyeurisme ; c'est de l'avoir fait en même temps qu'une foule de touristes qui comme nous, est venue observer les crémations (le soir de notre arrivée, la multitude de bateaux plein de touristes « garés » en face du principal crématoire nous a énormément choquées, on aurait dit qu'ils étaient au zoo, que ce n'était qu'une attraction intéressante, un spectacle …), a pris un bateau au lever du soleil, a pris en photo les gens en train de se baigner. Au final, il y avait plus de touristes que d'Indiens, et tout semblait presque une mise en scène pour touristes, comme les spectacles de danse « traditionnelles » que j'ai vus dans le Kerala et au Népal. Et puis, beaucoup de hippies viennent aussi à Varanasi parce que le cannabis est légal, et ils se retrouvent dans des bars ou restaus que tout le monde connaît, passer un bon moment … ce qui contraste terriblement avec le fait que Varanasi soit la ville la plus sainte de l'hindouisme !

  Mais comme tout le monde, j'ai pris des photos, et comme tout le monde, je vais les montrer ... Voici la balade en bateau à l'aube, au milieu d'une multitude d'autres barques, qui bien sûr sont priées de ne pas trop apparaître sur les photos, histoire de conserver l'illusion ;)


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(la plus basse des trois lumières est un bûcher ...)

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( Petite parenthèse :

   C'est du coup la ville qui m'a fait le plus réfléchir sur les bienfaits et plaies du tourisme (du moins en Inde) : un peu, c'est bien, pour nous et pour eux - ça permet de trouver facilement des endroits où dormir, les choses à visiter, il y a des jolies choses à acheter (parce qu'il faut bien l'avouer, ce qu'achètent les Indiens est … moche), les lieux d'intérêt sont mieux entretenus ; et puis les locaux sont plus ouverts, ils savent qu'on va leur apporter un peu de nos richesses et nous accueillent avec plaisir. Mais quand le coin est trop touristique, nous ne sommes plus vus que comme des porte-monnaies ambulants, les vendeurs deviennent insistants voire agressifs, les prix deviennent du n'importe quoi, il faut s'énerver sur tous les chauffeurs de rickshaw ; et l'endroit est souvent défiguré par le tourisme, perd de son authenticité, ne devient plus qu'une machine à faire de l'argent, et on a un peu envie de faire bêêêêêêê, je suis un mouton. C'est l'impression que m'ont donnée les alentours des monuments d'Agra, les propriétaires de canots à Varanasi, les cyclorickshaws à Delhi, les vendeurs au Népal ou à Goa, les chauffeurs de taxi d'Amritsar, qui voulaient tous nous amener voir la cérémonie à la frontière pakistanaise ; le pire sont certainement les rickshaws et chauffeurs de taxi qui attendent dans les gares des endroit touristiques, et te prennent limite les valises des mains pour t'emmener dans leur véhicule, en te proposant des prix exorbitants. Les villes plus petites et/ou moins touchées par le tourisme, ont toujours été des expériences beaucoup plus agréables : Hampi, Kolhapur, Bundi, Orchha, McLeod (dont je vais parler ensuite) ... Oula, je m'égare là, revenons à nos moutons/bœufs qui se baignent dans le Gange !

)

   En même temps donc, cette visite a été très enrichissante, déjà parce qu'elle nous a fait réfléchir à tout ça, à notre position de touriste (que je suis contente d'avoir choisi de passer cette année en Inde, et de ne pas avoir découvert ce pays uniquement avec des yeux de touriste !), mais surtout elle nous a permis de comprendre mieux la religion hindoue et la place qu'y a la mort. Le premier soir, nous avons eu droit à deux cours sur les crémations par deux étudiants (qui nous ont bien précisé que c'était « gratuit »), puisque nous n'avons eu que le temps de voir le « ghat » (volée de marches qui arrive dans l'eau) Mani Karnita, qui se trouve être le plus sacré en matière de crémation, celui où l'âme finit son samsara, ou cycle de réincarnations. Comme vous le savez sûrement, ces réincarnations sont au cœur de la religion hindoue : le « karma » de la personne (sommes des bonnes et mauvaises actions) doit être neutre pour en être libéré, autrement l'âme se réincarne dans une caste inférieure ou supérieure. La crémation permet à l'âme de se libérer plus facilement de l'enveloppe charnelle (ils cassent même le crâne pendant le rituel, pour que l'âme s'envole plus facilement !). On s'est demandés si les proches qui assistaient à la cérémonie funéraire étaient seulement tristes, ou aussi contents que l'âme du défunt soit libérée : on nous a répondu « les deux ». En tout cas, ça ne les dérange absolument pas de se faire observer par des dizaines de touristes ; et puis l'endroit ressemblait à une usine, les corps étaient apportés sur un brancard en bambou les uns après les autres, enveloppés dans les linceuls, et plusieurs brûlaient en même temps, remplacés par le suivant une fois la crémation finie. Tout ça donnait à la mort un côté très impersonnel, froid, machinal, et nous mettait profondément mal à l'aise. Nous n'avions pas le droit de prendre des photos (logique en même temps, il s'agissait de créméonie funéraires!), voici donc simplement celle d'un temple (à la Pise) un peu plus loin, pour vous montrer l'ambiance, et une photo tirée d'un site sur les crémations hindoues, prise exactement de l'endroit d'où nous observions la scène (sauf que c'était la nuit).

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  Deux détails intéressants : les femmes n'assistent pas à la cérémonie, parce que "elles sont trop sensibles, et que leurs pleurs dérangent la libération de l'âme". Et certaines catégories de personnes ne sont pas brûlées mais jetées dans l'eau : ceux qui ne sont pas morts d'une mort naturelle (accident, meurtre, maladie) parce que cela signifie que leur karma n'était pas bon ; les femmes enceintes et les enfants, qui sont purs ; les lépreux parce que ce sont des élus des Dieux ; ceux qui sont morts d'une piqûre de cobra, qui est le symbole du Dieu Shiva ; et enfin les Saddhus, hommes saints, par définition assez purs pour ne pas avoir besoin d'une crémation.

  Quelques autres photos prises pendant nos promenades sur les ghats ...

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Sieste au soleil

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