" L'Inde c'est pas dégueulasse " dixit Claire-Ma

Levée à 6h45, moi, Manon Rolland, et un dimanche de surcroît ! Car oui, enfin, nous sommes sortis de Pune pour aller faire une excursion, comme il est prévu depuis un mois et comme nous ne l'avions pas encore fait, inertie de groupe oblige. Des camarades de classe (que j'aime ce mot) d'Aurore avait prévu de bouger ce dimanche, nous nous sommes donc joints à eux - nous c'est-à-dire ceux qui restaient, puisque Florence, Anne, Dimitri et Audrey étaient en voyage, chacun de leur côté. Nous étions donc un petit groupe motivé par l'attrait de la nature, frais et dispos (ou presque) pour prendre le train à 8h10.

Le train, toute une aventure ... nous avons eu 20 secondes top chrono pour s'engouffrer par les portes qui restent toujours ouvertes, les portes du compartiment des femmes bien sûr, puisque celui des hommes "n'est pas sûr pour nous, et puis on nous regarderait bizarrement" (nous avons le droit d'aller dans le leur, mais ils n'ont pas le droit de venir dans le nôtre ...). Nos compartiments ont l'avantage d'être moins bondés, on peut s'asseoir plus facilement que nos voisins les mâles ; et nous n'avons pas à supporter de groupes alcoolisés qui hurlent à chaque station. Et puis surtout nous avons la chance de pouvoir faire nos courses pendant le voyage, puisque des vendeurs et vendeuses se succèdent à la file indienne pour vendre porte-clés en plastique, vernis à ongle, bijoux, en faux or chips, madeleines, bracelets en bois, stylos et autres babioles ... Et comme on est des filles, on ne résiste pas, forcément ! La preuve :

Après le train, il a fallu se mettre à marcher, puisqu'on était là pour ça ; on ne s'attendait pas vraiment à une balade de 8 heures jusqu'en haut d'une montagne, mais pourquoi pas ! Les paysages étaient magnifiques, toujours aussi verts, toujours aussi brumeux au loin, toujours aussi pleins de cascades ; mais celles-ci étaient cette fois remplies d'Indiens (souvent jeunes et souvent bourrés) qui venaient passer leur dimanche au bord de l'eau, comme nous allons à la mer.

Ah, si vous allez en Inde, pas la peine d'aller au zoo ; je n'ai pas encore vu de tigres ou de lions mais entre les écureuils qui se promènent dans le College, les corbeaux qui hantent les poubelles, les grenouilles, les vaches qui se prélassent au milieu de la rue, les cochons et les chèvres qui mangent les restes, les buffles/zébus qui travaillent dans les champs, les milliers de chiens errants, les chevaux, les papillons qui se laissent approcher à quelques centimètres, et maintenant les singes qui mangent dans la main des promeneurs et nous font parfois profiter de leurs moments intimes ( ! ) nous avons de quoi nous extasier et prendre des photos pendant des heures.

Et voici le fort Lohagad qui si j'ai bien compris signifie fort de bronze, étant donné qu'il a toujours résisté aux attaques et est encore en parfait état ; en même temps, perché sur le flan de la montagne, il semble effectivement difficile à prendre !

  

Nous avons fini la journée très fatigués, et très franchement d'un rose virant au rouge pour la plupart ; parce que le climat indien, c'est comme quand on va au ski, c'est pas parce qu'il y a des nuages que les mauvais rayons ne passent pas ! On en a fait les frais ... Mais on est contents de notre journée !

Seul note négative, sur laquelle nous avons malheureusement fini l'excursion, et qui nous a rappelé crûment une réalité de la société indienne : l'un des étudiants indiens, qui était accompagné de sa sœur, a violemment frappé celle-ci parce qu'elle ne s'était pas décalée assez du milieu de la route. Je n'ai rien vu et peu entendu du fait sur le coup, mais c'est en voyant Miriam survoltée et en larmes que nous avons compris que quelque chose ne tournait vraiment pas rond.

Cet épisode nous a rappelé que, s'il n'y en Inde pas beaucoup de règles qui sont suivies (la circulation, la sécurité, l'hygiène, l'administration ...) et qu'on retrouve partout, pour le dire vite, un joyeux bordel, les codes moraux et notamment ceux qui concernent le rapport entre les hommes et les femmes sont encore très prégnants. Que les hommes ne puissent pas entrer dans le compartiment des femmes, cela peut faire sourire ; qu'ils n'aient pas le droit d'aller chez elles avant le mariage, ça devient plus embêtant ; mais quand on sait que dans le College de Miriam les portes des résidences sont ouvertes jusqu'à 23h pour les garçons et 20h30 pour les filles "pour leur bien", on commence à se dire qu'il y a un problème ... La société est encore extrêmement dominée par les hommes, qui ont le devoir de "protéger" leurs sœurs, cousines et amies de ceux qui voudraient abuser d'elles, de faire les démarches à leur place, de leur payer les repas et autres (nous l'avons souvent remarqué avec Amit) ; si elles sont majoritaires à lluniversité, les femmes ont un faible niveau d'emploi par la suite, sont souvent mariées par leurs parents et restent à la maison avec les enfants. Ce qui en France nous semble sorti tout droit du XIXème siècle et du code napoléonien est encore ici la réalité quotidienne !